ANDREE FOUGERE
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HARCELEMENT SEXUEL ET AGISSEMENT SEXISTE


La distinction entre agissements sexistes et harcèlement sexuel peut s'avérer difficile. Cependant la notion de sexisme vise plutôt à codifier la notion d’« agissement à raison du sexe » que la discrimination et le harcèlement ne recouvrent pas à proprement parler.

 

L’article L. 1153-1 du Code du travail prohibe le harcèlement sexuel en disposant qu’aucun salarié ne doit subir des faits :

1° Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;

2° Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers”.

Des définitions symétriques sont adoptées dans l'article 222-33 du code pénal et dans l’article 6 ter de la loi du n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

 

La loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail a modifié la définition du harcèlement sexuel prévu à l'article L. 1153-1 du Code du travail pour l'étendre, d'une part, aux propos et comportements à connotation sexiste et, d'autre part, aux propos et comportement commis par plusieurs personnes, de manière concertée ou non, sans que chacune d'elle ait agi de façon répétée.

 

Le nouvel article L. 1153-1 du Code du travail étend le harcèlement sexuel aux propos et comportements à connotation sexiste également prohibés par l'article L.1142-2-1 du code du travail.

Le Guide pratique et juridique contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes édité en 2019 par le ministère du Travail apporte des précisions sur ce que peuvent recouvrir les propos ou comportement à connotation sexiste. Sont visés ceux :

– qui portent atteinte à la dignité de la personne en raison de leur caractère dégradant ou humiliant : propos, plaisanteries obscènes ou grivoises, mises en évidence de textes, images, vidéos, objets à caractère sexuel ou pornographique, regards insistants, sifflements, actes sexuels mimés, jeux de langue ;

– ou qui créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante : remarques sur le physique ou la tenue, cadeaux nombreux gênants malgré des refus successifs, contacts physiques non désirés (main sur l'épaule, accolades appuyées), propositions incessantes de sorties, invitations compromettantes malgré un refus, propos ou questions d'ordre intime concernant les pratiques sexuelles (V. Min. Trav., Guide pratique et juridique contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes).

 

Le nouvel article L.1153-1 du code du travail précise également les différentes formes que peut revêtir le harcèlement sexuel, en particulier lorsqu'il émane d'une pluralité d'auteurs.Le harcèlement sexuel peut ainsi être constitué lorsque les propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste :

émanent de plusieurs personnes, de manière concertée ou à l'instigation de l'une d'elles, alors même que chacune de ces personnes n'a pas agi de façon répétée ;

ou sont commis successivement par plusieurs personnes qui, même en l'absence de concertation, savent que ces propos ou comportements caractérisent une répétition.

 

Contrairement au droit pénal, la caractérisation de faits de harcèlement sexuel en droit du travail ne requiert pas l'existence d'un élément intentionnel:  la Chambre sociale de la Cour de cassation a rappelé que la décision du juge pénal, qui s'est borné à constater l'absence d'élément intentionnel, ne prive pas le juge civil de la possibilité de caractériser des faits de harcèlement sexuel de la part de l'employeur (Cass. soc., 25 mars 2020, n° 18-23.682).

Les modifications apportées au texte de l'article L. 1153-1 du Code du travail imposent aux chefs d'entreprise de:

1- revoir le contenu du règlement intérieur, lequel doit « rappeler les dispositions relatives aux harcèlements moral et sexuel et aux agissements sexistes » conformément à l'article L. 1321-2, 2° du Code du travail;

2- renforcer l'obligation de sécurité au travers tant de la prévention que de la réaction face à une situation de harcèlement.

 

Le harcèlement sexuel doit être distingué du comportement sexiste également prohibé par l'article l.1142-2-1 du Code du travail, issu de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi, qui dispose: “Nul ne doit subir d’agissement sexiste, défini comme tout agissement lié au sexe d’une personne, ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant” .

Dans un « Kit pour agir contre le sexisme », le Conseil supérieur de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes cite des exemples significatifs :

- critiquer une femme parce qu’elle n’est pas féminine ou un homme parce qu’il n’est pas viril ;

- avoir une conduite verbale ou une posture corporelle qui montre de l'hostilité envers une personne en raison de son sexe ;

- ne pas prendre les compétences des salarié(e)(s) au sérieux et les humilier ;

- user d’épithètes sexistes, ou faire des commentaires humiliants ou désobligeants, proférer des menaces ou tout autre comportement verbal ou physique fondés sur le sexe de la personne ;

- faire des « blagues sexistes » de manière répéter à une collègue ; fragiliser le sentiment de compétence des femmes parce que femmes par des remarques ou pratiques offensantes.

Trois éléments constitutifs doivent ainsi être réunis :

1. l’existence d’un ou plusieurs éléments de fait, pouvant prendre différentes formes (comportement, propos, acte, écrit), subi(s) par une personne, et donc, non désiré(s) ;

2. l’agissement, doit avoir pour objet ou pour effet de porter atteinte à la dignité du/de la salarié(e) ou créer un environnement de travail intimidant, hostile, humiliant ou offensant.

3. l’existence d’un lien entre les agissements subis et le sexe de la personne : un(e) salarié(e) subit ces agissement(s) de manière répétée parce qu’elle est une femme, ou parce qu’il est un homme.

 

Le critère de distinction entre harcèlement sexuel et comportement sexiste est à rechercher dans la volonté du harceleur

Les juges, par application de l’article L. 1153-1 du Code du travail dans sa version antérieure à 2012, relevaient que la volonté du harceleur d'obtenir des faveurs sexuelles devait être clairement exprimée. Le texte faisait ainsi du but poursuivi par l'agresseur un élément constitutif du harcèlement sexuel.Les gestes déplacés ou propos inconvenants qui ne visent pas à obtenir des faveurs sexuelles ne relevaient pas de la qualification de harcèlement, quoique revêtant une connotation sexuelle.

Par contre, dès lors que le salarié incriminé avait eu à l'égard de plusieurs collègues, et en dépit de leurs remarques et protestations, des attitudes et des propos déplacés dans le but manifeste d'obtenir des faveurs de nature sexuelle, le harcèlement sexuel était caractérisé, peu importe que l'employeur ait ou non toléré les faits en leur temps (Cass. soc., 1er déc. 2011, n° 10-18.920).

Sous l’empire de la loi nouvelle, sous sa seconde forme (le harcèlement sexuel par assimilation), la notion de « but réel ou apparent » laisse peu de doutes sur le caractère intentionnel. La volonté d’obtenir un acte de nature sexuelle est clairement affirmée comme un critère de qualification. Plus encore, le but peut être réel ou apparent, de sorte que tout argument visant à écarter le harcèlement faute d’intention est écarté. Par contre, pour le harcèlement sexuel stricto sensu (C. trav., art. L. 1153-1, 1°), l’expression claire d’une volonté de harceler ne semble pas requise par le texte.

 

La comparaison entre harcèlement sexuel et comportement sexiste impose de relever que seul le harcèlement sexuel permet à la victime de saisir la juridiction pénale, sur le fondement de l'article 222-33 du Code pénal qui sanctionne le harcèlement sexuel dont la définition a été enrichie aux propos et comportements sexistes et aux formes collectives de harcèlement, d'une peine de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende. Ces peines sont portées à trois ans d'emprisonnement et 45 000 € d'amende dans des cas particuliers (C. pén., art. 222-33, III).


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